La loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration a été publiée au Moniteur du 30 juin 1994. Elle est d'application au 1er juillet 1994 en vertu de l'arrêté royal du 23 juin 1994 publié dans ce Moniteur du 30 juin.
Les nouvelles obligations découlant de cette législation reprise en annexe, sont définies ci-après.
1. Champ d'application (article 1er)
Cette loi commentée vise, d'un point de vue général, à rendre public tout document administratif, c'est-à-dire toute information sous quelque forme que ce soit.
Il s'ensuit que toute donnée, qu'elle soit contenue dans un dossier, dans un fichier manuel ou dans un système informatique après traitement adéquat, tombe sous le coup de la loi.
Pour une part, la nouvelle législation recouvre donc le même objet (informations contenues dans des fichiers manuels/systèmes informatiques) que la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel (L.P.V.P.), commentée par les C.O. 1272, 1275 et 1280. L'attention sera donc ponctuellement attirée dans la présente circulaire sur les actions spécifiques des deux législations en cause.
2. Publicité active (articles 2 et 3)
2.1. Chaque caisse établit un document qui constitue une sorte de guide décrivant les compétences et l'organisation de son fonctionnement, ainsi que toutes les données qui sont utiles au public, par exemple les heures d'ouverture des services accessibles au public.
L'Office insiste afin que ce document soit le plus concis possible et soit réalisé de telle sorte qu'il n'entraîne pas l'exposition de frais nouveaux importants, de façon à permettre un octroi gratuit de celui-ci.
Le document à établir ne sera distribué que sur demande. La loi ne précise aucune forme particulière pour l'introduction d'une telle demande.
2.2. Toute correspondance doit dorénavant indiquer le nom, la qualité, l'adresse et le numéro de téléphone de la personne en mesure de fournir de plus amples informations sur le dossier.
Cette obligation n'est pas nouvelle à l'égard des caisses relevant du secteur public, mais n'était établie jusqu'ici que par voie de circulaire (circulaire 360 du 28 avril 1992 du Ministère de l'Intérieur et de la Fonction publique).
2.3. Chaque fois qu'il est statué sur le droit aux prestations familiales et qu'une notification de la décision d'octroi ou de refus est adressée à l'intéressé, il conviendra de signaler la possibilité de recours offerte.
L'obligation faite pour le régime en application de la C.M. 382 du 2 février 1981 acquiert ainsi dorénavant un caractère général et légal.
Il y a lieu de noter que la loi prévoit qu'il faut mentionner les voies de recours, les instances compétentes pour en connaître, les formes à respecter mais également les délais de recours. Vu que les lois coordonnées ne prévoient aucun délai spécifique de forclusion des actions en justice, il est inutile de préciser dans lesdites notifications que le délai de droit commun de 30 ans est applicable.
3. Publicité passive
3.1. Droit de consultation (articles 4 à 6)
La loi relative à la publicité de l'administration prévoit au profit des administrés un droit de consultation des informations détenues par les organismes remplissant une mission d'intérêt général.
Ce droit d'accès particulier est à distinguer du mécanisme prévu par la L.P.V.P., et décrit au point 2.1. de la C.O. 1275 :
- il s'agit ici d'obtenir un accès à une ou plusieurs données, que celles-ci concernent ou non une personne physique identifiée ou identifiable ;
- les informations en cause peuvent ou non faire l'objet d'un traitement au sens de la L.P.V.P. ;
- contrairement aux garanties prévues par la L.P.V.P., il ne s'agit pas dans le cas présent, d'obtenir communication de l'ensemble des données faisant l'objet d'un traitement, de façon à vérifier l'étendue du " profil " dressé au sujet d'une personne grâce à des fichiers manuels ou des moyens informatiques.
3.1.1. Principe général
Tout administré, une personne individuelle, une organisation ou association, a le droit à la publicité des documents administratifs, ce qui signifie qu'il a le droit de consulter sur place un document administratif, d'obtenir des explications à son propos et d'en recevoir une copie.
La demande doit être faite par écrit. Elle doit clairement indiquer la matière concernée et désigner si possible les documents administratifs particuliers qui font l'objet de la demande.
Les demandes doivent être consignées dans un registre, classées par date de réception.
Au cas où la demande ne concerne pas la caisse à laquelle elle est adressée, celle-ci en informe le demandeur et lui signale, sur base des éléments en sa possession, la dénomination et l'adresse de l'organisme apparemment détenteur du (des) document(s) administratif(s) en cause.
3.1.2. Recevabilité de la demande
Si la demande porte sur des documents administratifs à caractère personnel, la loi a prévu un mécanisme de recevabilité particulier, en ce sens que le demandeur doit justifier d'un intérêt.
3.1.2.1. La loi (art. 1er) définit le document à caractère personnel comme un document administratif comportant une appréciation ou un jugement de valeur relatif à une personne physique nommément désignée ou aisément identifiable, ou la description d'un comportement dont la divulgation peut manifestement causer un préjudice à cette personne.
Deux points sont tout d'abord à spécialement remarquer.
D'une part cette définition diverge de celle d'application dans le cadre de la L.P.V.P. pour laquelle est " à caractère personnel " une donnée relative à une personne physique identifiée ou identifiable. On évitera donc à tout prix de confondre ces deux définitions d'un contenu radicalement différent pour l'application respective des législations en cause !
D'autre part, dans le cadre de la loi sur la publicité de l'administration, le fait qu'un document administratif fasse mention de l'identité d'une personne ne suffit pas à en faire un document à caractère personnel.
Il faudra que le document à caractère personnel en cause ait un caractère appréciatif ou décrive une conduite qui, rendue publique, causerait un dommage à la personne visée.
3.1.2.2. L'intérêt exigé par la loi est compris dans le sens de l'intérêt requis pour la recevabilité d'une requête en annulation devant le Conseil d'Etat. Il faut donc que l'existence du document administratif provoque un préjudice matériel ou moral dans le chef du demandeur pour que la demande soit recevable.
Ce préjudice doit répondre à trois caractéristiques.
Il faut qu'il y ait atteinte à un intérêt personnel et légitime (c'est-à-dire conforme à l'ordre public et aux bonnes moeurs) du demandeur.
Le préjudice doit être actuel, c'est-à-dire qu'il doit exister au moment de la demande.
Enfin, le préjudice doit découler d'une manière directe de l'existence du document administratif en cause. En d'autres termes, le rapport de cause à effet entre le document et le préjudice doit être nécessaire.
Exemple :
Madame X, veuve, a été décrite par l'allocataire des allocations familiales d'orphelins au taux ordinaire, comme ayant abandonné l'enfant au sens des lois coordonnées.
Madame X souhaite consulter la lettre adressée par l'allocataire à la caisse.
Le préjudice moral invoqué par elle est à prendre en compte pour la recevabilité de sa demande.
3.1.2.3. La pratique administrative montre qu'un nombre restreint de documents à caractère personnel au sens de la loi du 11 avril 1994, sont détenus par les caisses. Dans les rares cas où les caisses auront à examiner l'intérêt invoqué par le demandeur, celles-ci auront à adopter une démarche très prudente, sachant que leur responsabilité peut être engagée en cas de divulgation abusive.
3.1.3. Motifs légaux de rejet de la demande
Même si la demande a été faite dans les formes requises et même si, éventuellement, elle a été déclarée recevable alors qu'elle avait trait à un document à caractère personnel, la caisse, dans un certain nombre de cas, pourra ou devra refuser de donner suite.
Seules les hypothèses pouvant intéresser le régime ont été isolés du texte légal (art. 6) et sont présentées ci-dessous.
3.1.3.1. La caisse peut rejeter une demande de consultation dans les cas suivants (art. 6, § 3).
- La demande concerne un document administratif dont la divulgation peut être source de méprise, le document étant inachevé ou incomplet.
- La demande concerne un avis ou une opinion communiqués librement et à titre confidentiel à l'autorité. Dans ce cas, il conviendra non seulement de protéger l'opinion émise mais également l'identité de celui qui l'a formulée. A titre d'exemple pour cette catégorie de cas, citons les avis et observations émises par les avocats ou les huissiers instrumentants à propos de la solvabilité de débiteurs ayant perçu indûment des prestations.
- La demande est manifestement abusive. Sachant qu'en vertu de l'article 10 de la loi, les documents administratifs obtenus ne peuvent être diffusés ni utilisés à des fins commerciales, il y aura ainsi lieu de rejeter les demandes émanant de sociétés commerciales. Dans le même ordre d'idées, peuvent faire l'objet d'un refus, les demandes systématiques de particuliers ayant pour effet de paralyser les services.
- La demande est formulée de façon manifestement trop vague.
3.1.3.2. La Caisse doit rejeter la demande de consultation s'il apparaît que l'intérêt de la publicité ne l'emporte pas :
- sur la protection du secret de l'identité de la personne qui a communiqué une information à titre confidentiel pour dénoncer un fait punissable ou supposé tel.
- sur la recherche ou la poursuite de faits punissables (articles 155 et suivants L.C., loi du 16 novembre 1972 sur l'inspection sociale).
Pour chaque cas d'espèce, il conviendra donc d'établir une balance des intérêts en jeu. La publicité d'une part, l'intérêt d'autre part d'obtenir de manière formelle la dénonciation de comportements (pratiques frauduleuses destinées à se faire octroyer indûment des prestations, exercice d'un travail non déclaré etc...) tombant ou pouvant tomber sous le coup de la loi pénale (1°). Le droit à l'information ou le risque de voir des éléments de preuve disparaître suite à la publicité donnée (2°).
3.1.3.3.3.Enfin la caisse doit rejeter la demande de consultation si la publicité donnée au document a pour effet de porter atteinte aux intérêts limitativement cités ci-après :
1° la vie privée, sauf si la personne concernée a préalablement donné son accord par écrit à la consultation ou à la communication sous forme de copie.
Il y a lieu de remarquer que la caisse n'a nullement l'obligation de consulter la personne concernée afin de jouer un rôle d'intermédiaire entre le demandeur et cette personne. Si l'accord écrit de la personne concernée est produit par le demandeur, il conviendra que la signature de celle-ci soit légalisée afin de prévenir les abus.
En pratique, cette règle légale doit être interprétée comme faisant en sorte qu'une personne donnée ne peut en principe accéder à des informations détenues par une autorité administrative concernant une autre personne.
Application aux tiers aux dossiers d'allocations familiales c'est-à-dire aux personnes autres que l'attributaire, l'allocataire ou l'enfant bénéficiaire.
La règle est absolue. Même un employeur ne pourrait ainsi consulter des documents administratifs concernant un attributaire pour vérifier la raison de la suppression du nom de l'attributaire sur le modèle G.
Application et tempéraments concernant desdemandes émanant d'attributaires ou d'allocataires ou d'enfants bénéficiaires.
Le principe est d'application concernant, par exemple, un parent séparé ou divorcé/attributaire à l'égard d'informations sans relevance directe sur le droit ouvert.
Cette personne ne peut ainsi avoir accès à des données telles que :
- les revenus de l'allocataire/autre parent ;
- l'adresse de celui-ci ;
- l'identité de l'employeur de celui-ci ;
- la composition de ménage de celui-ci ;
- les coordonnées de l'école fréquentée par les enfants.
Réciproquement, un allocataire divorcé ne pourrait recevoir communication de documents administratifs comportant les coordonnées de l'employeur de l'attributaire/ex-époux, cette donnée n'ayant pas de pertinence directe vis-à-vis de son droit.
Concernant les données médicales, le régime contraignant défini au point 2.2. de la C.O. 1273 reste d'application stricte.
2° une obligation de secret instaurée par une loi particulière.
Sont ainsi visés les agents de l'Office (service du Contrôle) concernés par l'application de l'article 12 de la loi du 16 novembre 1972 sur l'inspection du travail.
3° Le secret des délibérations des Comités de gestion.
3.1.4. Publicité partielle
La loi prévoit que lorsqu'un document administratif ne doit ou ne peut être soustrait que partiellement à la publicité (cf. point 3.1.3. ci-dessus) la consultation, l'explication ou la communication sous forme de copie est limitée à la partie restante.
3.1.5. Délais
La caisse dispose d'un délai de 30 jours pour accueillir ou rejeter la demande qui lui est adressée. Elle peut cependant informer le demandeur dans ce délai que sa requête est ajournée, ce qui a pour effet de prolonger le délai initial de 15 jours.
Il va de soi que les décisions de rejet prises par les caisses devront être dûment motivées.
Toute décision doit mentionner les voies de recours ouvertes avec indication des formes et délais à respecter pour exercer ceux-ci (cf. point 3.3.).
En cas d'absence de communication dans le (les) délai(s) prescrit(s), la demande est réputée avoir été rejetée.
3.2. Demande de correction (article 7)
La loi prévoit que lorsqu'une personne démontre qu'un document administratif d'une autorité administrative fédérale comporte des informations inexactes ou incomplètes la concernant, cette autorité est tenue d'apporter les corrections requises sans frais pour l'intéressé.
3.2.1. L'attention des Caisses est spécialement attirée sur le fait que si les informations en cause font l'objet d'un traitement comme défini par la C.O. 1275 du 12 janvier 1994, la procédure à suivre (délais/recours) est celle établie par la L.P.V.P.
Si au contraire la donnée ne fait pas l'objet d'un tel traitement, c'est la loi sur la publicité de l'administration qui s'applique et donc la procédure commentée par la présente circulaire.
3.2.2. La demande doit être introduite par écrit.
Il importera bien entendu d'être très attentif à l'identité du demandeur. L'ensemble des données d'identification reprises dans la formule utilisée dans le cadre de la L.P.V.P. (cf. annexe à la C.O. 1280) seront donc à réunir. Les consignes données au point 3.2.2. de la C.O. 1280 sont également applicables dans le contexte de la présente circulaire.
3.2.3. La Caisse dispose d'un délai de 60 jours pour accueillir ou rejeter la demande de correction qui lui est adressée. Elle peut cependant informer le demandeur dans ce délai que sa requête est ajournée, ce qui a pour effet de prolonger le délai initial de 30 jours.
Il va de soi que les décisions de rejet prises par les caisses doivent être motivées.
Toute décision doit mentionner les voies de recours ouvertes avec indication des formes et délais à respecter pour exercer ceux-ci (cf. point 3.3.).
En cas d'absence de communication dans le (les) délai(s) prescrit(s), la demande est réputée avoir été rejetée.
3.2.4. Lorsque la demande est adressée à une caisse qui n'est pas compétente pour apporter les corrections, celle-ci en informe sans délai le demandeur et lui communique la dénomination et l'adresse de l'organisme qui, selon ses informations, est compétent pour le faire.
3.3. Recours (article 8)
3.3.1. La loi a tout d'abord prévu une procédure de recours non contentieuse.
Lorsque le demandeur rencontre des difficultés (refus, réponse jugée parcellaire, absence de réaction de délai) pour obtenir la consultation ou la correction d'un document administratif, il peut adresser à la caisse concernée une demande de reconsidération.
Dans le même temps où le demandeur propose à la caisse de revoir sa position, il demande à une commission ad hoc, dénommée Commission d?accès aux documents administratifs, de formuler un avis sur la question. Cette commission est établie rue Royale 64-66, 1000 BRUXELLES.
La Commission précitée dispose d'un délai de 30 jours pour rendre son avis qui est communiqué à la fois au demandeur et à la caisse.
Dans les 15 jours de la réception de l'avis ou de l'écoulement du délai dans lequel l'avis devait être communiqué, la caisse doit statuer sur la demande de reconsidération. Passé ce délai, la caisse sera censée rejeter la demande de révision.
3.3.2. Une fois la décision de la caisse définitive, c'est-à-dire après notification de la décision reconsidérant la décision initiale ou après écoulement du délai dans lequel la décision de reconsidération devait intervenir, un recours est ouvert au demandeur auprès du Conseil d'Etat dans les soixante jours. Ce recours est formé par une requête datée et signée adressée à Monsieur le Premier Président du Conseil d'Etat, rue de la Science 33 à 1040 BRUXELLES.
Au cas où le Conseil d'Etat ferait droit à la demande du plaignant (annulation de l'acte administratif), ce dernier pourrait alors saisir les tribunaux afin d'obtenir un éventuel dédommagement.
4. Application de la C.O. 1148 du 25 mai 1985
Les communications réalisées au bénéfice des administrés (personnes physiques ou morales) en application de la loi du 11 avril 1994 telle que commentée par la présente circulaire, ne peuvent être constitutives d'une violation du secret professionnel auquel est astreint le personnel des caisses.
Les caisses trouveront en annexe de la présente circulaire, un modèle qui peut être utilisé pour l'introduction des demandes en correction de données et qui s'inspire de la formule établie parla Banque-Carrefour de la sécurité sociale, dans le cadre de la loi sur la protection de la vie privée.
L'attention des caisses est toutefois attirée sur le fait que l'Office mettra au point une nouvelle présentation de cette formule calquée sur celle utilisée pour les nouveaux modèles AA et E.